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La processionnaire du pin

Thaumetopoea pityocampa

Géographie - Autour du bassin méditerranéen : Europe méridionale, Moyent-Orient, Maroc. En France, la processionnaire est présente dans l'Ouest et le Sud-Ouest, dans le Sud-Est et la Vallée du Rhône sous une ligne Rennes-Orléans-Mulhouse mais ne cesse de progresser vers le nord, dans les moyennes vallées de la Loire et du Cher, dans le Massif Central, et dans le Jura et les Alpes (avec une progression en altitude).

Préjudices - Outre le préjudice d'ordre esthétique, les chenilles provoquent aussi une perte de croissance et un affaiblissement de l'arbre propice à favoriser l'attaque d'autres ravageurs. De plus, la Processionnaire du pin présente un risque sanitaire important dû aux poils fortement urticants de la chenille.

Ordre : lépidoptère heterocère

Famille : Notodontidae

Statut réglementaire : aucun.


Fiche technique

Plantes hôtes :

T. pityocampa se développe de préférence sur le Pin noir d'Autriche, le Pin laricio de Corse, et le Pin maritime. Elle peut aussi se retrouver sur les autres espèces de pin comme le Pin sylvestre, le Pin d'Alep, et plus rarement sur les Cèdres.

Morphologie :

Les adultes: Les papillons font 35-40 mm. La femelle a un abdomen volumineux, cylindrique avec une partie terminale noire. Ses antennes sont filiformes.

Les mâles sont plus petits avec un abdomen plus étroit présentant un pinceau de poils écailleux à son extrémité. Les antennes sont longues et pectinées.

Les chenilles: de couleur foncée, elles portent de nombreuses touffes de poils brun-rouge. Elles possèdent de plus en position dorsale des miroirs composés de poils urticants. Ces poils sont de très petites tailles (0,08-0,16 nm) et réfléchissent la lumière. Ils sont fusiformes avec une extrémité portant des barbules acérées qui permet leur pénétration dans la peau mais pas leur extraction. Ces poils contiennent une protéine urticante : la thaumétopoéine.

Les chenilles présentent une évolution en 5 stades larvaires.

Biologie :

Les adultes émergent en juillet-août au coucher du soleil. Les femelles émergées émettent des phéromones qui attirent les mâles. L'accouplement dure pendant à peu près une heure.

Les femelles fécondées déposent leurs œufs en manchons brunâtres (2-3 cm) d'environ 200 œufs déposés en épis de maïs à la base des aiguilles ou autour de petits rameaux. La femelle camoufle ensuite sa ponte en déposant des écailles abdominales. La femelle peut voler sur plusieurs kilomètres. Après l'accouplement et la ponte les adultes meurent très rapidement.

L'éclosion a lieu 30-40 jours après la ponte. L'évolution larvaire se fait en 5 stades :

- les stades L1, L2, L3 : ces jeunes stades édifient des pré-nids en soie sur les aiguilles qu'ils dévorent. Les chenilles se déplacent de branches en branches en étant reliées entre elles par des fils de soie. Dans ces pré-nids on trouve après 12 jours les exuvies de L1 puis 20 jours plus tard celles de L2.

- au stade L3 : apparition des poils urticants. Ces poils urticants sont libérés par les chenilles lors des déplacements ou bien quand elle se sentent en danger. Les miroirs s'ouvrent et les poils libérés sont emportés par le vent.

A la mi-novembre, les chenilles tissent sur la partie la plus ensoleillée de l'arbre un nid d'hiver correspondant à une volumineuse bourse de soie (jusqu'à 20 cm de diamètre) qui servira d'accumulateur de chaleur pour les stades L4, L5 durant l'hiver. Le nid comprend deux enveloppes superposées et aucun orifice de sortie ; les chenilles se faufilent à travers les mailles du tissage.

- les stades L4, L5 sortent la nuit pour se nourrir et réintègrent les bourses pendant la journée. La digestion ne peut alors avoir lieu qu'à la chaleur des bourses (environ 15°C de différence entre l'intérieur et l'extérieur).

Au printemps (de février à mai), le stade L5 forme des processions de nymphose très souvent guidées par une chenille qui donnera une femelle. Toutes les chenilles d'une même ponte descendent.

Au sol si la température est inférieure à 10°C, les chenilles restent au sol sans bouger. Si la température est supérieure à 22°C, les chenilles arrivant au sol s'enterrent directement. Entre les deux, les chenilles se déplacent à la recherche des zones les plus chaudes et les plus ensoleillées. Quand les conditions sont remplies elles s'enterrent pour se nymphoser au sein d'un cocon en une chrysalide qui rentre en diapause.

Cette diapause peut être levée rapidement avec une émergence aux mois de juillet-août ou bien être prolongée pendant un, deux ou trois ans. Le taux de diapause prolongée est d'environ 0% en zone méditerranéenne et peut avoisiner 100% dans les montagnes Corses (Biliotti et al).

Même si le cycle biologique est généralement annuel, il existe des gradations des populations de processionnaires sur des intervalles de 7 à 10 ans. Sur 2-3 ans la densité des chenilles augmente très rapidement pour atteindre une culmination qui dure 2-3 ans (on assiste à une défoliation très importante des arbres attaqués) puis la densité régresse pour atteindre un seuil de latence avant une nouvelle gradation.

Symptômes et dégâts :

A) Au niveau des arbres

Outre un préjudice esthétique causé notamment aux arbres d'ornements, les chenilles engendrent d'une part une défoliation (partielle ou totale) qui provoque des pertes de croissance pouvant être conséquentes sur les jeunes peuplements et d'autre part affaiblissent l'arbre qui devient alors sensible aux attaques de ravageurs xylophages ou aux maladies.

Dès la fin de l'été l'extrémité des pousses jaunissent et des petits nids de soies se forment. Plus tard ces nids deviennent de grosses bourses de soie avec présence dans ou à leur proximité des chenilles.

Les bordures de peuplements ainsi que les arbres isolés mais aussi les plantations pures sont les plus sensibles aux attaques car la femelle repère les arbres hôtes d'après leur silhouette.

B) Au niveau sanitaire

Les poils urticants produits dès le troisième stade larvaire et qui restent présents dans les nids d'hiver pendant plusieurs années peuvent causer des réactions cutanées plus ou moins prononcées au niveau du visage et du cou, des bras et des mains. Ces réactions (démangeaisons et parfois œdèmes) peuvent durer une quinzaine de jours et sont amplifiées par la sueur qui assouplit la peau et facilite la pénétration des poils dans l'épiderme.

Ces poils peuvent aussi, si ils ne sont pas enlevés très rapidement, engendrés de graves lésions occulaires (cataracte, glaucome, ...). Leur inhalation peut être sources de gênes respiratoires ou de crises d'asthme.

Ces poils peuvent enfin être préjudiciables pour les animaux sauvages, d'élevage et domestiques et notamment chevaux et chiens. Le plus souvent les lésions sont une nécrose de la langue, des oedèmes aux babines et des vomissements.

Moyens de lutte

A) Moyens mécaniques

Cela consiste à prélever à l'aide d'un sécateur ou d'un échenilloir les pontes, les pré-nids, ou les nids d'hiver qui sont ensuite brûlés.

Ceci doit se faire avec l'utilisation d'une combinaison intégrale et de protection pour le visage, pour éviter tout contact avec les poils urticants. Ces moyens sont surtout applicables pour les particuliers, les espaces verts ou les petits peuplements.

B) Traitements chimiques

Largement utilisés jusqu'au début des années 1990, ils ne sont désormais plus utilisés que ponctuellement du fait de leur impact désastreux sur la faune.

La liste des produits autorisés pour ces traitements est disponible sur le site http://e-phy.agriculture.gouv.fr/, rubrique Usages.

C) Lutte biologique

Cette lutte se fait avec Bacillus thuringiensis kurstaki (Btk) et vise les chenilles qui mourront après ingestion du produit présent à la surface des aiguilles. Les produits autorisés pour ces traitements sont disponibles sur le site http://e-phy.agriculture.gouv.fr/, rubrique Usages.

Il existe aussi à l'état naturel un certain nombre de prédateurs de Thaumetopoea pityocampa qui peuvent avoir un impact très important sur les populations en attaquant tous les stades. Il s'agit par exemple d'agents pathogènes (virus, bactéries), d'éphippigères prédateurs des œufs, de nombreux hyménoptères (Chalcidiens, Braconides, Ichneumonides), de diptères, d'oiseaux.... La prédation des chenilles est notamment assurée par un coléoptère carabidé : Calosoma sycophanta, à l'état adulte mais aussi larvaire.